LA CONFÉRENCE DE MÉDAILLÉ DE CAUCHER BIRKAR

La vie romanesque de Caucher Birkar – sa naissance dans une famille d’agriculteurs du Kurdistan iranien, son expérience de la guerre Iran-Irak, son statut de réfugié au Royaume-Uni et pour finir, le vol de sa médaille Fields lors de la cérémonie d’ouverture – a failli faire oublier l’essentiel : c’est un grand mathématicien et un scientifique d’une exceptionnelle générosité. Récompensé pour ses contributions remarquables sur les variétés de Fano, « le seul individu à avoir reçu deux fois la médaille Fields », pour citer son chairman Junghai Chen, a livré sur la classification des variétés algébriques un exposé incroyablement clair, étant donnée la complexité du sujet.

Avec une pincée d’humour, prenant le public par la main, il a patiemment défini les concepts indispensables tel le genus (le nombre de trous dans une surface de Riemann), les variétés algébriques (les « surfaces » solutions d’une équation polynomiale), les notions de variétés lisses et de points singuliers, l’espace projectif en n-dimension, les variétés projectives dans un tel espace… Il a explicité les différences de fond entre les possibles approches des problèmes touchant à la théorie des nombres, à la géométrie algébrique, à la topologie. Surtout, il a présenté les trois sortes de variétés spéciales qui seraient le fil rouge de sa conférence (celles de Fano, celles de Calabi-Yau et celles canoniquement polarisées), d’une grande importance dans plusieurs domaines des mathématiques mais aussi en physique (en particulier pour la théorie des cordes ou la symétrie miroir), avant d’énoncer des conjectures et de parler de résultats récents. On en ressortait certes pas géomètre algébriste mais tout de même un peu plus familier de cet univers réputé inaccessible.

Comme ses collègues, Caucher Birkar a eu droit à son bain de foule et de flashes après son exposé.